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L'Institut Tunisien des Etudes Stratégiques (ITES), en partenariat avec la fondation Konrad-Adenauer-Stiftung (KAS), vient de publier un Document de Politique Générale (Policy Paper) intitulé " Secteur informel : Inclusion, transition et conformité ".
La dynamique économique de la Tunisie se distingue par l'existence de trois blocs aux comportements et aux performances distincts : le bloc structuré, regroupant les entreprises organisées en entités individuelles ou sociétaires, le bloc informel, constitué d'activités sans comptabilité, et le bloc administratif, rassemblant les administrations publiques.
Selon les chiffres de l'Institut national de la statistique (INS), ces blocs représentent respectivement 52 %, 28 % et 20 % du produit intérieur brut (PIB), tandis qu'ils contribuent à l'emploi dans des proportions de 36 %, 44 % et 20 %.
À noter que le secteur public englobe les administrations et les entreprises publiques intégrées au bloc structuré.
L'évaluation de la contribution de chaque bloc au bien-être national varie selon les critères adoptés. En considérant les critères macroéconomiques de production, d'investissement, d'exportation et de fiscalité, le bloc structuré se révèle être le principal pourvoyeur de ressources pour le pays.
Cependant, en termes d'emplois et de lutte contre la pauvreté, le bloc informel joue un rôle plus prépondérant en employant 44 % de la population active, contre 36 % pour le bloc structuré, et en procurant des revenus aux couches les plus défavorisées.
Par ailleurs, en ce qui concerne les aspects sociaux, le bloc administratif revêt une importance primordiale en fournissant les services publics essentiels tels que la sécurité, la santé et l'éducation.
L'informalité : Une transition graduelle
L'informalité est un phénomène présent dans tous les pays, mais son ampleur varie en fonction de leur niveau de développement. Il ne faut pas la considérer comme un fléau à éradiquer, mais plutôt comme une situation transitoire qui doit être progressivement formalisée.
En effet, l'économie informelle est hétérogène, regroupant des acteurs économiques ruraux qui n'ont pas accès aux circuits organisés, ainsi que des entreprises performantes qui écoulement une partie de leur production sur le marché parallèle afin d'éviter les impôts indirects (TVA, droits de douane) et directs (impôt sur les sociétés).
Les petits producteurs informels échappent à l'impôt, mais ils doivent supporter des taux d'intérêt excessifs sur les microcrédits contractés et ne bénéficient pas de la protection de la sécurité sociale.
Evolution du secteur informel depuis l'indépendance
En Tunisie, le secteur informel a connu différentes phases. À l'époque de l'indépendance, il était prédominant, en lien avec la domination du monde rural dans le pays. Avec le développement du secteur public, le secteur informel a reculé relativement.
Cependant, l'émergence du secteur privé a engendré une activité industrielle offshore qui a pu écouler une partie de sa production sur le marché local pour échapper aux impôts, conduisant ainsi à un nouveau développement d'activités commerciales informelles.
Les bouleversements politiques survenus dans la région depuis la Révolution ont favorisé le développement de ces activités informelles, qui ont pris une dimension extraterritoriale, notamment dans le secteur du tabac et de l'électroménager.
Récemment, conscient du manque à gagner pour le budget et de la nécessité de lutter contre la corruption, l'État a pris des mesures pour limiter l'expansion du secteur informel, mais des actions plus décisives doivent être entreprises pour encadrer ce secteur et l'intégrer progressivement dans les circuits économiques organisés.
Face à ces enjeux, l'OIT a formulé un ensemble de recommandations visant à formaliser progressivement l'économie informelle, des recommandations qui doivent être adaptées au contexte économique et social tunisien.
Intégrer le secteur informel pour le bénéfice économique et social
Ce rapport retrace l'évolution des activités informelles en Tunisie depuis l'indépendance du pays. Il présente des statistiques récentes synthétisant la situation du secteur informel, notamment en soulignant que sa productivité est moitié moindre que celle du secteur structuré, ce qui est significatif.
Des expériences menées dans d'autres pays ayant réussi à réduire l'informalité sont également exposées. Enfin, des mesures concrètes, déjà appliquées ailleurs, sont proposées afin de permettre au secteur informel de continuer à contribuer sur les plans économique et social, tout en l'intégrant progressivement dans les circuits formels pour le bénéfice de tous.
Mariem Ben Yahia
Publié le 07/06/23 10:10
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